Vous avez comme moi, vous qui navez vingt ans

Écrit vos premiers mots je sais il y a longtemps
Sur de pauvres cahiers et à l’encre violette
Avec la plume acier, bien avant les tablettes.

Avec le porte plume, l’encrier porcelaine
Et l’encre au bout des doigts qui n’était point vilaine
Elle peuple j’en suis sûr votre imaginaire
Du temps où l’écriture était chose ordinaire.

Elle portait un nom au parfum de tranchées 
En l’honneur des victoires de nos forces armées 
Tous les instituteurs alors la brandissaient 
Comme les hussards noirs qu’alors tous ils étaient.

Avant le stylo-bille qui plus tard l’a chassée 
Elle était la reine des pupitres d’écoliers 
Et sa fine écriture court sur tous les cahiers
De cette époque là, en pleins et déliés.

La plume sergent major c’était un univers
Odeur d’encre et de craie une vraie atmosphère 
Lorsque dans le cartable ballotait le plumier
Collé contre les livres et bordé de cahiers.

Avoir dans ces années premier prix d’écriture 
Un hommage rendu, sans tache ni rature,
C’était un tel plaisir alors pour les parents 
Qui lors vous embrassaient avec des yeux brillants.

Je n’ai plus retrouvé ce doux plaisir tactile
Ni le son de la plume qui grattait sur la page
Nous sommes à présent dans un monde d’images
Où il n’est plus besoin d’être aussi habile.

Écriture standard sans personnalité 
Cherchant la manuelle souvent à imiter
Mais plus cette esthétique qu’elle nous permettait
La plume sergent-major de mes jeunes années.