Sous leur empire

Quel orgueil de prétendre tout raconter du monde
Juste par quelques mots que l’on offre à la ronde.
Et pourtant, de tous temps, le poète et le barde
Ont dit tous les mystères des choses qu’on regarde.

Tout ce qui n’a de nom n’a aucune existence
Au sein de notre bulle où règne la conscience
Donner leur nom aux choses, c’est donc leur donner vie
Il n’y a de réel que ce que l’on en dit.

Cet immense pouvoir que détient le langage 
N’en abusera pas celui qu’on nomme sage
Pas plus que le poète, le conteur ou le barde
Qui veulent qu’on comprenne tout ce que l’on regarde.

Mais d’autres, fascinés par ce pouvoir des mots,
Comme par son jouet peut l’être un marmot, 
Les crieront haut et fort pour conduire à la guerre
Des peuples que ces mots auront pris dans leurs serres.

Pour ma part je les aime, les respecte et n’en use
Que sous le seul contrôle qu’y exerce ma muse
Ainsi lorsque j’écris je prends soin de vous dire
Ce que je sais du monde sous son constant empire.