Dans ses bagages.

Combien sommes nous donc à écrire ainsi
À noircir tant de pages, à dire me voici
À exposer nos rêves, nos amours, nos colères 
À dire en poésie, à distiller nos vers ?

Combien pouvons nous lire de ces cris, de ces songes
Combien en aimons-nous, sans dire de mensonges ?
Nous avons tant à faire et bien trop peu de temps
Pour les lire assez, sans nous taire pour autant.

Nous sommes ballotés entre désirs contraires
Lire jusqu’à plus soif ces kyrielles de vers
Ou bien plonger en nous pour aussi en extraire,
Permettre qu’à leur tour ils prennent un peu l’air.

J’ai passé tant d’années à lire et relire
Des milliers de romans la plupart oubliés 
Je ne saurai attendre bien plus de mes lecteurs
Déjà s’ils sont passés, ça me fait chaud au cœur.

Des milliers de poètes à tous les coins de rue
Qui se prennent la tête pour des textes perdus
Moi je suis à la fête quand un seul m’aurait lu
Je ne suis assez bête pour me croire élu.

Ah mes amis poètes quelle étrange tribu
Qui paye de ses mots son bien curieux tribut
Qui vient dire à tous à quel point le langage
Porte en lui le monde dans ses riches bagages.